Thomas Féjoz Luthier Interview 1 Background

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Thomas Féjoz Luthier – Pour celles et ceux qui ne te connaissent pas encore, peux-tu nous parler de ton parcours ? As-tu fait une école de lutherie ? As-tu suivi une formation auprès de luthiers déjà installés ? Et, si ce n’est pas indiscret que faisais-tu avant de te lancer dans cette aventure ? Étais-tu musicien avant de devenir luthier ? Ou faisais-tu tout autre chose ? Et, d’ailleurs, trouves-tu encore le temps de jouer de la musique avec ton travail de luthier ?

Oui, je suis passé par une école de lutherie entre 1995 et 1997, je suis tombé sur cette école en faisant un bilan de compétences !

L’idée était déjà là, dans un coin de ma tête mais cela me parraissait irréalisable .

Depuis tout petit, je ne me suis jamais épanoui dans une scolarité normale, toujours la tête dans les nuages et rester assis sur une chaise m’était insupportable.

Ce qui m’a « sauvé », c’est la musique, c’est mon moteur ! La guitare bien sur qui est mon instrument de cœur mais aussi les percussions .

Lorsque j’ai découvert l’existence de cette école de lutherie (ITEMM au MANS), je me suis dit pourquoi pas ! C’est en lien direct avec la musique et faire quelque chose de mes mains était une découverte aussi, j’y ai construit ma première guitare et c’était parti .

Plus tard, j ‘ai fait un stage avec Franck CHEVAL et celui-ci m’a soutenu et motivé pour me mettre à mon compte .

Voilà ! J’ai ouvert l’atelier en 2000 et je n’ai cessé depuis lors de construire des guitares, la 200 verra le jour dans les prochains mois …

Je joue un peu les guitares que je fabrique mais pas suffisamment à mon goût, la vie de famille et l’atelier me prennent beaucoup de temps .

J’écoute beaucoup de musique, en dehors mais aussi à l’atelier .

Mise à part la création d’instruments sur mesure, nous savons que tu fais tous types de réparations et d’entretiens des guitares et basses, peux-tu également t’occuper d’autres types d’instruments à cordes pincées et frottées ?

Nous sommes deux à travailler à l’atelier, Tom POIRIER m’accompagne depuis 5 ans maintenant et nous faisons tout type de réparations sur les guitares.

Parfois des instruments comme le oud ou les mandoles / bouzouky se retrouvent chez nous pour des réglages ou petites réparations mais je préfère rester dans ce que je maitrise bien, nous ne faisons pas les instruments du quatuor .

Thomas Féjoz Luthier – Peux-tu nous parler de tes modèles phares du moment ? As-tu une gamme que tu fais régulièrement ? Fais-tu également des modèles customs uniques ? Comment as-tu procédé pour les faire naître ? Quels ont été tes choix et ton processus de création ? À quel type de musiciens s’adressent-ils ?

J’ai développé une large gamme de guitares à cordes acier, c’est dans cette spécificité que je m’amuse le plus car on peut approcher un grand nombre de modèles et de gabarits différents…

Des formats Parlor : 0/00/000 inspirés des guitares Martin mais faitent à ma façon bien sur.

Je construis beaucoup de modèles « 0 », cette petite guitare envoie du bois ! C’est puissant, équilibré, hyper confortable et très épuré, cela correspond à une demande régulière en ce moment.

J’affectionne beaucoup les « 00 » et « 000 » qui sont pour moi des guitares hyper vivantes pour un jeu aux doigts .

J’ai aussi un format relooké dreadnought, deux formats de jumbos ….

Toujours avec cet immense plaisir de varier les couleurs sonores, je réalise des baritones avec fanned fret ou non, mais aussi des 7 cordes, 12 cordes sur plusieurs formats, jumbo, dreadnought, OM ……. je propose aussi plusieurs types de tête et de chevalets en fonction du modèle ou de l’accordage souhaité .

Contrairement à beaucoup de luthiers qui cherchent une identitié forte en proposant une tête unique, un chevalet unique voir une forme unique, je m’éclate dans la diversité !

C’est un parti pris qui me correspond bien, le travail étant essentiellement manuel, j ‘ai une grande liberté de réalisation .

Ma clientèle est très variée , du musicien pro ou amateur au collectionneur… Il n’y a pas de règle, l’essentiel étant d’avoir envie de se faire construire un instrument unique et vraiment à son idée, et le gros de mon travail est d’orienter mes clients vers la guitare qui leur correspondra le mieux .

Une autre partie de mon travail est plus spécifique.

Je propose un barrage de table très différent sur mes modèles Alizé et petit format de jumbo , j’ai nommé ce barrage « soloïste » car la guitare a une tessiture plus large, il y en a à tous les étages ! C’est une guitare très sensible .

Il est difficile de décrire des sons ou des sensations de jeux, l’idéal est d’essayer mais si je devais imager ça, on pourrait dire qu’il y a une différence au niveau de la réponse de l’instrument, quelque chose de plus rapide et un spectre harmonique plus large, c’est comme comparer une trompette et un bugle ….c’est proche mais différent à la fois .

Je construis aussi des guitare archtop , essentiellement un modèle 16 pouces entièrement sculpté à la main.

Une 17 pouces verra le jour plus tard car je souhaite la re-dessiner entièrement .

Je fais aussi parfois des Nylons mais plus adaptées aux guitaristes venant de la corde acier, des guitares éléctriques aussi .

Sur mon site web, j’essaie de proposer des prises de sons de très haute qualité pour réellement faire entendre le timbre et la tessiture de chaque instrument, cela est bien sur influé par le jeu du guitariste mais il me paraît essentiel de proposer une écoute fidèle dans les meilleurs conditions possible, il faut donc écouter avec un casque audio ou des enceintes correctes sinon cela ne sert à rien.

Thomas Féjoz Luthier – L’informatique est devenu le quotidien de chacun, quel que soit le métier qu’on exerce. As-tu recours à des outils particuliers dans le domaine de la lutherie. Peux-tu nous en parler ?

Non pas vraiment, il peut m’arriver de me faire aider pour des projets bien particuliers ou des gabarits avec des machines pilotées par ordinateur, je préfère faire travailler les personnes qui ont ces compétences au besoin.

L’informatique me sert à alimenter mon site web, traiter les photos que je prends de mes instruments ….

Thomas Féjoz Luthier – Ceux qui te connaissent savent que tu es un grand amateur de belles essences de bois, comment aides-tu tes clients à choisir les bois de leur future guitare par rapport au son qu’ils ont en tête ? Arrives-tu à trouver facilement du bois dans tes réseaux ? Si oui, peux-tu nous citer quelques-uns de tes fournisseurs ?

Chaque guitariste a un son « dans l’oreille » et cherche malgrè lui à retrouver ce son qu’il connaît déjà .

Ce qui revient assez souvent, c’est le souhait d’avoir un son plus personnel, plus boisé et des aïgus moins métalliques, les guitares même haut de gamme du commerce manquent souvent de caractère !

Il y a donc un travail à faire pour expliquer l’incidence des bois de caisse sur le timbre de la guitare…

Il faut apprendre à les connaître, et apprendre à mettre des mots sur des sons, ce n’est pas simple mais petit à petit cela s’affine, c’est vraiment un apprentissage de longue haleine et il faudrait plus d’une vie pour faire le tour de la question .

Le stock du luthier se fait dans le temps, trouver les bois n’est pas toujours facile et il faut aussi laisser le temps au séchage …. je ne crois pas au bois torréfié ou séché artificiellement même si cela est bien utile pour des touches en ébène par exemple.

A mon sens cela correspond a des effets d’annonces ou l’on veut faire croire aux guitaristes que la guitare peut sonner comme une ancienne ! Le bon vieillissement d’un instrument se fait avant tout par la vibration .

Ce métier est hors du temps et même si il faut bien en vivre, il est opposé pour moi a une notion de rentabilité ou de profit à court terme … il faut laisser le temps faire son travail, laisser le temps aux arbres de pousser et cesser de vouloir rentabiliser chaque mètre carré de la planète .

Aujourd’hui les vendeurs de bois proposent des bois très impressionnants visuellement mais aussi très fragiles mécaniquement et fendifs ! Cela fait aussi parti de l’apprentissage de ce métier.

Le jeu du guitariste aussi va influer la façon dont sera réalisée la guitare, le tiran de cordes, le profil du manche, tout est sur mesure !

C’est de la haute couture mais c’est ainsi que devrait être réalisé tout bon instrument.

Thomas Féjoz Luthier – Il existe un énorme choix de pièces aftermarket. Travailles-tu avec des fournisseurs réguliers ou es-tu toujours en quête de nouveaux fournisseurs qui pourraient te proposer des nouveautés ? As-tu des exemples à nous donner ?

Je travaille principalement avec Fred guitar parts , l’échange est toujours agréable, simple et direct, c’est mon principal fournisseur d’accastillage.

Pour le reste je cherche toujours de nouveaux fournisseurs pour les bois, les cordes etc.….mais ce qui m’inporte avant tout est toujours la qualité des matériaux, le prix n’est pas mon premier critère.

Quand tu ne trouves pas les pièces que tu veux chez tes fournisseurs aftermarket, t’arrive-t-il de créer des pièces toi-même ou de faire appel à des artisans spécialisés ? Peux-tu nous donner des exemples ?

Oui, par exemple j’ai récemment fait découper une pince au laser pour un reset neck sur une guitare Gurian, sans cet outil je n’aurai pas pu faire ce travail correctement.

Comment choisis-tu les micros pour tes instruments électriques selon les demandes que te font tes clients ? As-tu des secrets ou des habitudes en termes de câblage ? As-tu déjà eu des demandes très particulières, ou qui t’ont paru étrange de la part de certains clients qui avaient des besoins particuliers ?

J’ai assez peu de demande en guitare éléctrique car cela n’apparait pas clairement dans mon catalogue.

Soit mes clients ont leurs modèles de micros en tête, soit je propose Hep cats pickup mais c’est une nouvelle personne qui a pris le relais récemment : Julien LANDAT, il m’a fabriqué un micro type paf 57 qui va venir sur une archtop 16 pouces que je suis en train de terminer.

Je travaille aussi avec les micros Benedetti, j’essaie d’orienter vers une production Française si possible .

Vernis… Nitrocellulo, P.U (polyurethane) ou tampon ? Quels sont tes choix et pourquoi ?

Mon vernis est du Nitrocellulosique, c’est pour moi le plus beau vernis et le mieux adapté à mes guitares, il est très fin, très dur et se polie bien.

C’est aussi celui que je maitrise le mieux .

Thomas Féjoz Luthier Interview 1 Background – Parlor

Thomas Féjoz Luthier – Comment aides-tu tes clients à choisir leurs capteurs électro-acoustiques ?

Selon leurs attentes !, du simple et efficace, une ou deux sources ? Le budget ?

Il faut savoir que c’est toujours un compromis, donc j’ai trois références et je leurs fais écouter lorsque cela est possible : lrbaggs/k and K/MISI

Rien de tel qu’un micro devant la guitare ou éventuellement un col de signe dpa4099….

Thomas Féjoz Luthier Interview 1 Background – Baritone

Comment aides-tu tes clients à choisir les bois de la touche de leur instrument par rapport au son qu’ils désirent obtenir ? Peux-tu nous parler de l’incidence de ce choix par rapport aux autres bois utilisés lors de la construction d’un instrument ?

Pour moi c’est essentiellement ébène ou palissandre, l’érable plus rarement sur acoustique mais je peux le proposer sur un instrument éléctrique…

Je parle surtout de la densité du bois et de la façon dont il va vieillir.

Le touché, c’est très personnel ! et la différence de son à l’attaque de la note peut être plus net avec un bois plus dense mais je pense que cela est très subjectif.

Thomas Féjoz Luthier Interview 1 Background – Parlor 0

Es-tu intéressé également par la fabrication d’amplis et d’effets ? Et, si ce n’est pas le cas, vas-tu aller dans cette direction comme de nombreux autres luthiers ?

Pas pour l’instant !

As-tu des conseils à donner aux futurs jeunes luthiers en devenir ? Tu peux les faire bénéficier de conseils au niveau des formations ? Connais-tu des écoles spécialisées ?

Il faut s’accrocher !!!

C’est dur et c’est long surtout dans la fabrication ….. il y a plusieurs écoles en France et à l’étranger.

L’ITEMM, en France, est une école qui dispense une formation sérieuse et de bonne qualité avec de bon profs !

Le plus difficile étant aussi de trouver un maître d’apprentissage lorsque celle-ci se fait en alternance .

Le métier de luthier est un métier qui nécessite un investissement matériel important pour démarrer son activité. Que conseillerais-tu à un jeune luthier d’acheter pour débuter ? Le minimum requis ? Et, le maximum pour être dans un confort de travail ?

C’ est une question qui peut être très large ! Tout dépend de ce que l’on souhaite faire : fabrication / réparation ….. cela ne nécessite pas le même outillage .

De plus, on peut faire de la lutherie avec des outils très différents selon si on aime les machines ou un travail plus manuel, sans parler du fait qu’il faut se fabriquer soit même certaines machines pour des opérations très spécifiques .

Pour moi, les machines sont une aide indispensable pour aller un peu plus vite et amener plus de confort mais cela doit rester un travail essentiellement manuel, il faut s’adapter en permanence aux bois que l’on utilise et il est complètement incohérent d’utiliser un processus trop mécanisé et uniforme…

Il n’y a pas deux bouts de bois identiques et cela est vrai bien évidement surtout pour l’acoustique .

Pour le reste, l’industrie est là et je ne vois pas l’intérêt de venir tenter une production trop mécanisée à part bien sur pour réduire les coûts de construction et le temps de travail mais le résultat est aussi en conséquence .

Je ne réponds pas vraiment à ta question mais énumérer une liste d’outillage est pour moi assez rébarbatif je l’avoue !

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